Vidalou
Michel (Miquel) dit Sébastien
Né le 26 septembre 1884 à Ille-sur-Têt et mort
dans la même commune le 8 avril 1945 ; anarchiste ; antimilitariste
; insoumis en 1914.
Michel Vidalou naquit le 26 septembre 1884 à
Ille-sur-Têt dans une famille d’agriculteurs Joseph Vidalou
(né en 1845 à Ille) et Anne Ribes (née en 1851).
Marié à une date non connue à Marguerite, Anne,
Jeanne, Calmon, originaire de Carcassonne (Aude), il exerça
à Ille la profession de maréchal-ferrant. Il ne manifesta
pas d’idées antimilitaristes puisqu’il accomplit
son service militaire au 3e régiment d’artillerie de
Castres (Tarn), du 8 octobre 1905 au 18 septembre 1906. Il obtint
un certificat de bonne conduite.
Dans les listes des insoumis établies en juillet 1915, il résidait
à Figueres (Province de Gérone, Espagne) depuis deux
ans et avait catalanisé son prénom, Miquel. Il ne rejoignit
pas l’armée et il fut donc un des rares anarchistes à
être allé au bout de ses idées antimilitaristes.
L’armée le déclara insoumis seulement le 20 janvier
1918. Pendant toute la guerre, il vécut à Figueres avec
sa femme et, au début, avec l’anarchiste Etienne Alart*
qui avait quitté Ille la veille de la mobilisation pour rejoindre
Vidalou. Le couple considérait leur hôte comme «
un vrai crampon » dans un courrier de février 1915. Il
continua d’échanger du courrier avec « le camarade
» François Doutres. François, Joseph, Jean Doutres
était né le 6 septembre 1880 à Montauriol dans
une famille d’agriculteurs. C’était un maçon
révolutionnaire et libertaire. Il possédait un «
caractère exalté et violent » selon la police.
En avril 1909, avec Boniface Escudier*, maire socialiste de Canohès
(Pyrénées-Orientales), dirigeant du Syndicat des ouvriers
agricoles, et l’anarcho-syndicaliste Vassail*, il relança
Germinal, la section antimilitariste de Perpignan. Il était
considéré par la police comme l’ « alter-ego
» de Vassail. En 1910, il fut secrétaire de la Bourse
du travail de Perpignan et membre du syndicat des terrassiers, aide-maçons
et similaires. Vidalou, dans le courrier qu’il lui adressa en
février 1915, rejetait la guerre et parlait de « foule
immonde », « des tigres de France [qui] achèveront
bientôt de se battre ». Il semblait éprouver de
la joie aux défaites françaises : « c’est
avec joie que j’éprouve la leçon que la France
reçoit, que te dirais [-je] de plus que le communisme est loin
d’être réalisable ».
Même si Michel Vidalou inquiétait moins les autorités
françaises qu’Alart, son domicile fut perquisitionné
par la police espagnole à la demande du commissaire spécial
de Cerbère en octobre 1914. La vie était difficile à
Figueres par manque de travail et il le signalait dans sa lettre :
« Avec le cri de la guerre, tous les patrons ont cessé
leur travail, il y a un chômage complet. Moi, depuis la noël
que je n’avais rien fait et maintenant, je travaille dans une
scierie de bois. Nous faisons dix heures de travail pour gagner 2
Fr. 75, c’est joli pour Figueres. Enfin sans pouvoir travailler,
j’étais résolu à faire comme les lapins
à vivre d’herbes ». Alart adopta par contre les
pratiques des anarchistes illégalistes, la « récupération
», c'est-à-dire le vol, ce que ne fit pas Vidalou.
Michel Vidalou fit sa soumission à Perpignan le 3 octobre 1921.
Comme les insoumis ne furent pas touchés par les mesures d’amnistie,
il fut condamné par le conseil de guerre du 26 novembre 1921
à cinq ans de prison pour insoumission en temps de guerre.
C’était le maximum de la peine encourue. Il fut incarcéré
au pénitencier d’Albertville (Savoie) le 1er décembre
1921. Il bénéficia d’une remise de peine d’un
an le 31 janvier 1924, 6 mois le 6 février 1924 et 3 mois le
20 décembre 1924, ce qui permet de conclure que sa peine fut
augmentée en prison. Il fut élargi le 10 janvier 1925
après quatre ans et trois mois d’emprisonnement. Il revint
à Ille-sur-Têt où il exerça la profession
de scieur. Il divorça à une date inconnue. Il mourut
à Ille à l’âge de soixante ans le 8 avril
1945.
Sources :
Sources : Archives Départementales
des Pyrénées-Orientales (ADPO) 1 R 471 : registre matricule
de la classe 1904. — ADPO 5 Mi 250 : registre d’état-civil
de la commune d’Ille-sur-Têt (année 1845). —
ADPO 5 Mi 317 : registre d’état-civil de la commune de
Montauriol (année 1880). — ADPO 5 Mi 252 : registre d’état-civil
de la commune d’Ille-sur-Têt (année 1884). —
ADPO 2 J 37 : questionnaire sur la Bourse du Travail de septembre
1911, complété et envoyé par le préfet
au ministre de l’Intérieur. — ADPO 2 R 227 : courrier
du général Ferré, commandant la 16e Région
militaire, au préfet le 16 mars 1916. — ADPO 4 M 148
: rapport du commissaire spécial de Cerbère au préfet
le 8 septembre 1914. — ADPO 1 M 618 Lettre de Figueras du 2
février 1915 (Adresse Miquel Vidalou, Figueras). — La
Bataille Sociale (1909-1910), Organe des socialistes révolutionnaires
des Pyrénées-Orientales. — Archives Nationales
F7-14700 : Déserteurs et insoumis signalés comme réfugiés
à l’étranger. Lettre de Barcelone du 6 juillet
1915, envoyée par le SCR à l’Intérieur
(Sûreté Générale). Liste des déserteurs
connus du consulat général à la date du 5 juillet
1915 et établie par le commissaire spécial de Cerbère.
— Archives Municipales d’Ille-sur-Têt, acte d’état-civil
n° 49 de 1945 (décès).
Miquèl Ruquet